Yucatán, gastronomie sous influences.

 

Voici ci-dessous, un article sur la cuisine du Yucatán parue dans la revue française Délices de février-mars 2010.
Cet article est une ode à la cuisine yucatèque, ses saveurs, ses senteurs, ses ingrédients.
Il m´a été envoyé par Yannig Oliviero, un chef français, je dirais même le chef français à Mérida dans les années 80-90. Yannig est reparti vivre en France avec sa famille mais je suis certaine qu´en lisant cet article il a dû se remémorer plein de saveurs qui lui ont mis l´eau à la bouche car la cuisine yucatèque par son originalité et son exotisme est une cuisine très particulière qu´on apprend à aimer et que l´on n´oublie jamais.

Yucatán, gastronomie sous influences.

Au premier plan, mameyes et zapotes .

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D´où proviennent les ingrédients qui forment l´alimentation de base d´un peuple ? A quoi reconnaît-on les saveurs d´une région ou d´un pays ? Si Oaxaca est la capitale de l´agave, Puebla celle du mole, quelles sont les sapidités du Yucatán ? On pourrait dire que le Yucatán est le paradis du maïs et de la tomate, de la chaya et de l´orange amère, du citron vert et de la cebolla, de la coriandre et de l´origan, ou encore du miel et du mamey et de dizaines de plats régionaux aussi exotiques que délicieux, une fois ces produits savamment agencés entre eux. On pourrait dire aussi que la cuisine yucatèque a le goût du métissage et qu´elle combine subtilement l´alimentation millénaire indigène avec la tradition culinaire européenne et l´exotisme des Caraïbes.
Ici, dans la péninsule du Yucatán, nichée entre le golfe du Mexique au nord et la mer des Caraïbes à l´est, se conjuguent toutes ses influences hétérogènes pour restituer un large éventail de saveurs, tantôt douces et sucrées, tantôt amères et piquantes qui non contentes de réveiller nos sens nous propulse dans un voyage aux confins de l´histoire des premières grandes civilisations d´Amérique latine et ce dès la première bouchée...

Calabazas, chayotes, tomates et citrons verts... .

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Des aliments de base ancestraux.
Avec tout le respect qu´on doit à ses origines, la cuisine yucatèque s´est largement inspirée de la culture maya. Les ingrédients qui structurent ses plats sont les mêmes que ceux que les mayas utilisaient eux-mêmes il y a de nombreux siècles. Son alimentation de base se compose des fruits du milpo, une agriculture triangulaire intensive pratiquée par les mayas et qui a perduré jusqu´à aujourd´hui dans la péninsule. Elle comprend le maïz (le maïs jaune et noir), les frijoles (haricots noirs) et la calabeza (une courge verte foncée presque noire). Ajoutons-y également, le cacao ou encore le pavo (la dinde) que les mayas avaient su domestiquer puis élever pour s´en nourrir et ce bien avant l´arrivée des espagnols.

Avocats, citrons verts et coriandre. .

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Une cuisine métissée
Justement lorsque les espagnols débarquent dans la péninsule autour de 1540, ils sont surpris de trouver un peuple pour qui chaque repas est un grand évènement. Peu à peu, grâce à la fusion des deux cultures, la maya et l´espagnole, un métissage culinaire se forme et s´enrichit de nouveaux ingrédients comme les câpres, les olives, le riz, le poivre, le vinaigre et de nouvelles viandes telles le porc et la poule, créant ainsi une nouvelle gastronomie d´une diversité et d´un raffinement exceptionnel.

Epices, graines, fruits au sirop...au mercado grande de Mérida. .

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Son ample éventail d´arômes, ses espèces exotiques avec ses belles couleurs ouvrent un univers nouveau aux palais qui s´y aventurent et donne naissance à des plats exquis qui enchantent les sens de ceux qui les goûtent. Sopa de lima (soupe au citron vert), crema de cilantro (velouté de coriandre), cochinita pibil (cochon de lait cuit dans un four creusé dans la terre), papadzules (tortilla garnie d´œuf coupé en morceaux assaisonnée d´une sauce aux graines de courge), salbutes (tortilla fourrée à la purée de haricot noir et garnie), panuchos (plat à base de galette de maïs et de haricots noirs), poisson tikin´xic (braisé), queso relleno (fromage fourré), dulce de papaya con queso (papaye glacée au fromage), meringues et biscuits au coco ne sont que quelques uns des délices quotidiens des repas yucatèques. Pour les fêtes on confectionne des mets succulents comme le mucbil pollo (un pain de maïs cuit sous terre pendant la Toussaint ou le pavo en relleno negro (une dinde marinée dans de l´epazote -fausse ambroisie- et baignée de sauce noire).

Assortiment de chiles et derrière à droite les limas et oranges amères. .

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Le repas typique de la péninsule.
Mais assez bavardé, passons à table! Commençons par l´apéritif. Servi dans des chopes à bière, on a le choix entre une infusion glacée d´hibiscus violet (jamaïca) ou une agua fresca de chaya. La chaya est une plante verte cousine de l´épinard qui pousse dans la jungle de la péninsule. On vous la sert broyée, en macération avec de l´eau sucrée et glacée accompagné de guacamole et de totopos (les chips de maïs).
Le palais à peine remis de ses premières émotions givrées, dans un subtil jeu de chaud et froid, on nous apporte las sopas qui annoncent le début du repas. Sopa de lima, velouté de chaya ou de calabaza (courge), on veut tout goûter ! En bouche, c´est onctueux et doux, presque divin !
Le temps de reprendre nos esprits et les plats de résistance entrent en scène. Là, c´est la surprise ! Au centre du plat, à côté du x´nipek et d´une purée de haricots noirs : un paquet cadeau! En guise de papier, des feuilles de bananier retenues par une mince ficelle. On tire le fil, on écarte les feuilles et là, les narines se dilatent instantanément au contact d´un fumet jusqu´alors inconnu. C´est le pollo pibil (poulet mariné dans du jus d´orange amer, de l´ail et du cumin et cuit dans des feuilles de bananier avec des oignons et des tomates). C´est très parfumé et la volaille fond sur la langue...

Maïs dans les sachets à gauche puis dulce de camotes (patates douces), de  yuca, de papaye, cocoyoles au sirop, mangues vertes pelées dans les sachets.  .

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Vous prendrez bien une petite douceur ? Pastel de tres leche (gâteau aux trois laits), dulce de papaya con queso. Tels sont les repas servis par les chefs dans les haciendas des terres de la péninsule comme dans les comida rapida de la capitale de l´état : Mérida.
Au bord de mer à Celestún ou à Campeche, le poisson vole la vedette aux viandes. Ceviche, camarones al coco de Campeche, camarones al ajo, les plats changent mais le plaisir est toujours là. Mieux il s´intensifie. Les pieds dans le sable, les cheveux au vent, la gastronomie de la péninsule accompli les derniers centimètres de la conquête de nos palais avec une paleta, sorbet ou glace aux fruits de saison montée sur double bâtonnet. Mamey, tamarin, noix de coco, fraise et bien sûr cacao. On oublie le temps, on s´enivre de senteurs inconnues, on se remplit les yeux de mille couleurs, on soupire de bonheur, on laisse notre esprit voguer au rythme des vagues, on pense déjà au prochain voyage...

Marchande de fleurs, au premier plan basilic et romarin. .

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Pour illustrer l´article, j´ai pris toutes les photos au mercado grande, le marché central de Mérida.

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